La sobriété numérique est une démarche qui consiste à adopter un rapport au numérique plus conscient et responsable, en vue de réduire son impact environnemental, social et économique. Elle invite à limiter nos usages numériques et à concevoir des services numériques plus sobres, en passant d’un numérique instinctif à un numérique réfléchi (Brigade numérique, s. d.; Observation sur la réussite en enseignement supérieur [ORES], 2025).
Mais pourquoi la sobriété numérique est-elle si importante ?
L’importance de la sobriété numérique réside principalement dans l’impact croissant du secteur numérique sur l’environnement. Le numérique est responsable d’environ 3 à 4 % des émissions de gaz à effet de serre (GES) dans le monde et consomme environ 10% de l’électricité mondiale et ce sont des chiffres qui sont en augmentation (CHUK&CO, s. d.). La fabrication des équipements, la construction des centres de données et des réseaux représentent 78% de l’empreinte environnementale du numérique, tandis que l’utilisation en représente 21% (ORES, 2024). Prendre conscience de cette pollution invisible est une première étape cruciale vers la sobriété numérique (Dupuis, 2024).

Lien avec l’économie circulaire
La sobriété numérique entretient un lien étroit avec l’économie circulaire, qui vise à optimiser l’utilisation des ressources et à réduire les déchets. Un des principes de la sobriété numérique est de prolonger la durée de vie de nos appareils, de les réparer et de favoriser le réemploi. Ceci s’oppose à l’obsolescence programmée, qui encourage le renouvellement fréquent des équipements. La mutualisation des équipements au sein des organisations est également une pratique qui s’inscrit dans cette logique. De plus, la sobriété numérique encourage une réflexion sur nos besoins réels avant l’achat de nouveaux appareils, ce qui peut limiter la surconsommation et la production des déchets électroniques. La prise en compte de critères environnementaux dans les politiques d’achats des organisations est aussi un levier important (ORES, 2024).
Les avantages de la sobriété numérique sont multiples :
- réduction de l’impact environnemental : Diminution de la consommation d’énergie, de l’extraction de ressources naturelles, des émissions de GES et de la production de déchets électroniques;
- amélioration du bien-être : Lutte contre l’hyperconnexion, réduction du stress, amélioration de la concentration et du sommeil (Association québécoise des organismes de coopération internationale [AQOCI], 2021);
- optimisation des coûts : Réduction des dépenses liées à l’achat de nouveaux équipements, à la consommation d’énergie et au stockage de données inutiles;
- sécurité numérique accrue : Une meilleure gestion des données et des équipements peut renforcer la sécurité(CHUK&CO, s. d.);
- développement d’une éthique numérique : Favorise une réflexion sur nos valeurs et notre rapport à la technologie(Brigade numérique, s. d.);
- innovation responsable : Encourage la conception de services numériques plus efficaces et durables comme l’écoconception (ORES, 2024).
La sobriété numérique se traduit par des actions concrètes à différents niveau
Au quotidien (individuel) :
- gérer sa boîte de courriels : Se désabonner des infolettres inutiles, éviter les envois multiples superflus, supprimer les anciens courriels et les pièces jointes volumineuses non nécessaires (AQOCI, 2021);
- limiter le visionnage de vidéos en streaming : Privilégier le téléchargement en basse résolution ou le visionnage sur des écrans plus petits lorsque possible (Flipo, 2021);
- prolonger la durée de vie de ses appareils : En prendre soin, les faire réparer au lieu de les remplacer systématiquement (ORES, 2025);
- utiliser le cloud à bon escient : Supprimer les fichiers inutiles, optimiser le stockage (Brigade numérique, s. d.);
- privilégier le Wi-Fi à la 4G/5G lorsque possible;
- éteindre et débrancher ses appareils lorsqu’ils ne sont pas utilisés (Hydro-Québec, s. d.);
- utiliser des moteurs de recherche écoresponsables comme Ecosia (UQAM, s. d.);
- participer à des initiatives comme la Journée mondiale du nettoyage numérique, le 3ième samedi de mars chaque année (Dupuis, 2024).
En entreprise et au sein des organisations :
- sensibiliser les employés aux enjeux de la sobriété numérique;
- mettre en place une politique de mutualisation des équipements et une politique de numérique responsable;
- inclure des critères environnementaux dans les politiques d’achats;
- optimiser les serveurs et les centres de données pour réduire leur consommation énergétique;
- développer des services numériques écoconçus;
- limiter la collecte, le stockage et l’exploitation des données;
- privilégier les logiciels libres et les licences ouvertes;
- soutenir des initiatives de sobriété (cafés réparation, fab labs);
- former à la littératie de la sobriété numérique (ORES, 2024).
Défis et recommandations
Plusieurs défis complexes peuvent entraver l’adoption de la sobriété numérique. L’invisibilité de l’impact environnemental du numérique rend la prise de conscience plus difficile (Dupuis, 2024). L’effet rebond, où les gains d’efficacité sont annulés par une augmentation de l’usage, est également un enjeu majeur. De plus, l’ancrage de l’hyperconnectivité dans les normes sociales et culturelles rend la remise en question des usages délicate (ORES, 2025). Le manque d’information et de données quantifiées sur l’impact du numérique au Québec est aussi un frein (Blais, 2024).
Plusieurs outils et ressources peuvent aider les entreprises à intégrer la sobriété numérique :
- la Charte de la sobriété numérique de l’Université de Montréal peut inspirer les organisations (UDM, s. d.);
- des formations et ateliers sur la sensibilisation à l’écologie numérique sont proposés par des organisations comme Ecoist Club à travers leur application et calculateur (Dupuis, 2024);
- des outils d’évaluation de l’empreinte carbone de sites web comme Website Carbon Calculator;
- des MOOCs sur le numérique responsable (Institut national de la recherche scientifique, s. d.);
- des projets de recherche comme ceux de The Shifters Montréal sur l’impact des TIC au Québec et au Canada;
- des ateliers comme la Fresque du Numérique pour comprendre les enjeux environnementaux du numérique;
- des guides pour réduire son empreinte numérique au bureau (Brigade numérique, s. d.).
En conclusion, la sobriété numérique n’est pas une option, mais une nécessité pour construire un avenir plus durable et respectueux des limites planétaires. En adoptant une approche consciente et en agissant collectivement, nous pouvons faire du numérique un outil au service du bien commun, tout en préservant notre environnement et notre bien-être.